La création récente de la direction générale de la Commission européenne pour le Moyen-Orient, l’Afrique du Nord et le Golfe (DG MENA) en février 2025, sous l’autorité politique du commissaire Dubravka Šuica, témoigne de l’engagement renouvelé de l’UE en faveur d’un engagement sur mesure et spécifique à la région.
Dans ce contexte, le nouveau pacte pour la Méditerranée devrait ouvrir la voie à un espace commun de paix, de prospérité et de stabilité dans la région méditerranéenne, en s’appuyant sur les fondements de l’agenda 2021 pour la Méditerranée et en développant des instruments innovants et des approches différenciées qui reflètent les besoins distincts de chaque pays partenaire.
Cependant, les premières indications sur ce que couvrira le nouveau Pacte pour la Méditerranée ne semblent pas inclure les concepts clés que les praticiens de l’environnement de la région espéraient. En fait, plusieurs organisations de la société civile de tous types dans la région ont réagi avec un mélange d’espoir et de prudence.
Peut-être attentif à ces préoccupations, le commissaire Šuica a pris, début 2025, la décision audacieuse de lancer un processus de consultation à l’échelle de la région, soutenu par la DG MENA, qui se poursuit actuellement. Des enquêtes et des réunions avec les parties prenantes dans toute la Méditerranée sont certains des outils de consultation utilisés, tandis qu’elle et son cabinet organisent des réunions avec des représentants de tous les groupes de parties prenantes, y compris avec le MIO-ECSDE le 27 mai à Bruxelles – en tant que fédération d’ONG de 28 pays et représentant des millions de citoyens de la Scandinavie au Golfe – pour échanger directement sur les priorités, les inquiétudes et les aspirations.
Dans un contexte d’accélération de la dégradation de l’environnement, d’insécurité climatique, de fragilité sociale et d’incertitude géopolitique, MIO-ECSDE et ses ONG membres ont souligné que le nouveau pacte devrait refléter un engagement et un leadership forts de l’UE en faveur d’une Méditerranée pacifique, prospère et durable. Ils soulignent également le besoin urgent pour le nouveau pacte d’intégrer et d’inclure la protection de l’environnement, la résilience climatique et l’autonomisation de la société civile comme des priorités.
Signe d’une coordination étroite de la nouvelle Commission européenne, le Pacte européen pour l’océan qui vient d’être annoncé mentionne que, par le biais de la prochaine proposition de « loi sur l’océan », les États membres de l’UE seront encouragés à passer d’une approche nationale à une approche à l’échelle du bassin maritime. À cet égard, ils seront encouragés à coopérer avec les pays voisins, dans le cadre des organismes de coopération régionale existants, par le biais des stratégies macrorégionales de l’UE, ainsi qu’à s’appuyer sur les phares à l’échelle du bassin de la mission de l’UE « Restore our Ocean and Waters » (Restaurez nos océans et nos eaux). Il mentionne également le nouveau pacte pour la Méditerranée, en vertu duquel, en collaboration avec l’Union pour la Méditerranée, la Commission soutiendra l’élaboration d’une stratégie d’économie bleue pour les bassins maritimes de la Méditerranée orientale, qui ne dispose pas actuellement d’une structure de coopération spécifique, sur le modèle de l’initiative WestMed et en coopération avec les organismes régionaux existants. Reconnaissant que la Méditerranée n’est pas seulement une région d’opportunités mais aussi une région de grande vulnérabilité socio-environnementale, toute stratégie doit impliquer de manière significative la société civile, l’expertise scientifique et les mécanismes de gouvernance locale afin d’aborder efficacement cette complexité.
En outre, la stratégie européenne pour la résilience de l’eau, qui vient d’être lancée et qui vise à restaurer et à protéger le cycle de l’eau, à garantir une eau propre et abordable pour tous et à créer une économie de l’eau durable, résiliente, intelligente et compétitive en Europe, fait également référence au « nouveau pacte pour la Méditerranée » à venir ainsi qu’à l’agenda 2030 de l’Union pour l’eau en Méditerranée, dans l’esprit du renforcement des partenariats nationaux et régionaux sur l’eau afin de faire face à la pénurie croissante d’eau et aux effets du climat dans la région. L’UE s’engage également à soutenir les pays candidats et les pays voisins dans cette voie. La stratégie reconnaît l’importance de l’intégration des connaissances scientifiques dans l’élaboration des politiques et met en place des forums et des initiatives de recherche pour soutenir cette démarche. Toutefois, elle reste assez générale sur les processus et les outils spécifiques qui permettront de traduire systématiquement les connaissances scientifiques en actions politiques à tous les niveaux de gouvernance. Bien qu’il mette l’accent sur le dialogue, la recherche et l’innovation, les cadres concrets ou les feuilles de route détaillées explicitement conçus pour combler le fossé entre la science et la politique ne figurent pas en bonne place dans les documents accessibles au public.
Selon le cabinet du commissaire, une première version du nouveau pacte pour la Méditerranée sera prête pour un nouveau cycle de consultation, l’objectif étant de disposer d’une version finale largement acceptée à l’automne 2025. Il sera annoncé et célébré conjointement peu après au niveau ministériel.
Alors que le nouveau pacte prend forme, MIO-ECSDE exhorte la Commission européenne et les partenaires méditerranéens à poursuivre une vision régionale cohérente et ascendante qui équilibre les besoins locaux avec des défis géopolitiques et environnementaux plus larges. Les priorités spécifiques que MIO-ECSDE a mises en avant sont les suivantes :
- Adopter l’approche Nexus du WEFE : L’eau, l’énergie, l’alimentation et les écosystèmes doivent être gérés de manière intégrée pour assurer la résilience et la durabilité en Méditerranée. Nous demandons instamment l’adoption formelle et la mise en œuvre de la stratégie méditerranéenne WEFE Nexus déjà élaborée.
- Migration climatique : Si le changement climatique doit être considéré comme une base potentielle de protection internationale, les définitions et les seuils doivent être clarifiés pour le distinguer des événements extrêmes mais isolés. Il est plausible qu’une crise migratoire majeure due au climat se produise au cours des deux prochaines décennies. L’UE doit proactivement concevoir des stratégies d’adaptation avec les pays les plus vulnérables afin de renforcer la résilience et de minimiser les déplacements.
- Diplomatie de l’eau fondée sur la science : Nous appuyant sur notre implication de longue date dans les initiatives régionales, nous plaidons pour une gouvernance participative basée sur la science comme fondement d’une gestion efficace des eaux transfrontalières et d’une diplomatie de l’eau.
- Gouvernance inclusive, suivi et responsabilité : La coopération future doit se fonder sur un dialogue et une prise de décision multipartites impliquant les gouvernements nationaux, les autorités locales, la société civile, les institutions scientifiques, etc. Des mécanismes solides doivent être mis en place pour assurer le suivi de la diplomatie verte et bleue et de la coopération environnementale, avec la participation des organisations de la société civile et d’autres acteurs non étatiques clés, afin de garantir la transparence et la responsabilité.
MIO-ECSDE réaffirme également qu’aucune coopération méditerranéenne significative ne peut réussir sans connaissance locale, participation publique, égalité des sexes et inclusion des jeunes.
« La Méditerranée est confrontée à une crise multidimensionnelle. La dégradation de l’environnement, la pénurie d’eau et l’insécurité induite par le climat menacent non seulement les écosystèmes, mais aussi la cohésion sociale et la stabilité politique. La société civile demande que le nouveau pacte pour la Méditerranée ne mette pas de côté les considérations environnementales et climatiques et ne néglige pas le rôle crucial de la société civile, des réseaux scientifiques, des femmes et des jeunes dans l’élaboration de l’avenir de la région. » (Prof. Scoullos – Président de MIO-ECSDE)
MIO-ECSDE réitère sa volonté de collaborer étroitement avec les institutions de l’UE et les partenaires méditerranéens afin que le nouveau pacte pour la région devienne un document de référence et reflète l’urgence de la protection de l’environnement et les principes d’équité, de participation et de durabilité dans une Méditerranée pacifique.